Le guide du meuble ancien
La construction des meubles anciens
Menuisiers et ébénistes
- Avec la division du travail, la fabrication du meuble devient à partir du XIIIe siècle l'apanage d'une organisation corporative.
- Des charpentiers, auxquels est réservé le travail et la transformation du bois, se détachent les huchiers qui produisent des caisses et des coffres, puis les menuisiers.
La corporation
- Cette organisation corporative, qui donne naissance à plusieurs branches de plus en plus spécialisées, bénéficie d'un privilège dont l'accès est sévèrement réglementé.
- Un long apprentissage de six à neuf ans, le respect de techniques précises soigneusement décrites, l'emploi de matériaux bien définis, la réalisation d'un chef-d'œuvre, preuve des capacités techniques de l'aspirant... et le paiement de droits d'admission souvent importants, précèdent l'entrée dans la corporation.
- Encore faut-il souligner que les règles d'admission sont assouplies pour les fils d'artisans menuisiers et que les jurys sont plus sévères pour les compagnons que pour les fils de maîtres.
- Toutefois le privilège n'est pas exclusif, il y a également des artisans sous privilège royal qui travaillent et même logent au Palais du Louvre, à l'Arsenal ou, plus tard, aux Gobelins.
- Enfin des colonies d'ouvriers libres exercent dans le fameux faubourg Saint-Antoine, au Temple ou aux Quinze-Vingts.
- Ces ouvriers doivent toutefois se conformer aux normes édictées par la corporation dont ils subissent régulièrement le contrôle impitoyable.
- Ce qui explique l'action vigoureuse menée par le faubourg Saint-Antoine, lors de la Révolution pour obtenir l'abolition des corporations.
- A partir du XVIIe siècle la corporation se divise en deux branches, les menuisiers en bois et les menuisiers en ébène ou ébénistes.
- Les premiers fabriquent des meubles en bois massif dits aussi en bois naturel et quelquefois les bâtis des meubles en bois de placage.
- Aux seconds est réservée l'exécution des meubles en bois de placage ou en marqueterie.
- Cette distinction est abolie à la Révolution, conséquence directe de la suppression des corporations.
- Au X1Xe siècle la réactivation des sociétés compagnonniques, sociétés ouvrières à ne pas confondre avec les corporations, sociétés d'artisans, a pour résultat de maintenir la qualité des techniques et le goût pour le bel ouvrage, malgré l'industrialisation croissante de la fabrication du meuble.
- Les menuisiers et ébénistes ne sont pas les seules corporations à participer à l'histoire du meuble: vernisseurs, doreurs, sculpteurs, bronziers, tapissiers, serruriers et mécaniciens, gainiers et tabletiers sont autant de corporations annexes, jalouses de leurs privilèges, qui jouent un rôle particulièrement actif aux XVIIe et XVIIIe siècles.
- Si leur place est importante à Paris ou encore dans quelques grands centres provinciaux, précisons que la division du travail s'amenuise ou disparaît dans les petits ateliers polyvalents des villes de province ou des gros bourgs.
L'estampille
- Concrétisation de l'appartenance à la corporation, l'obligation d'estampiller les ouvrages apparaît aux alentours de 1730, instituée avec les dérogations d'usage en 1743, légalisée en 1751 par un édit royal.
- Marque, signature de l'artisan, l'estampille, poinçon de métal gravé en relief, est frappée dans le bois des sièges et des meubles à des emplacements discrets, sous l'emplacement d'un marbre, sur le bord d'un tiroir, sur une traverse, sur le bâti, etc...
- Elle indique le nom de l'artisan, souvent accompagné des initiales de son ou ses prénoms pour le distinguer, car il existe de véritables dynasties de menuisiers-ébénistes qui exercent sur plusieurs dizaines d'années.
- Elle est souvent accompagnée des trois lettres JME, marque de contrôle de la jurande, bureau de plusieurs jurés nommés par la corporation des menuisiers ébénistes, d'où les lettres JME, marque qui donne lieu au versement d'une taxe, à laquelle bien des menuisiers et ébénistes tentent d'échapper.
- Un meuble peut comporter plusieurs estampilles, celle du menuisier mais aussi celle du sculpteur, du marqueteur, du bronzier, etc... voire celle du marchand-mercier, intermédiaire qui passe commande à divers ateliers.
- L'usage de l'estampille survit à l'abolition des corporations et reste en vigueur au XIXe siècle.
- Il faut éviter de confondre la ou les estampilles avec les marques de châteaux, de collections, d'inventaires ou de garde-meubles.
- De même que certains amateurs attachent plus d'importance à la signature d'un tableau qu'à ses qualités esthétiques, des collectionneurs de meubles préfèrent acquérir des meubles estampillés.
- Ainsi à qualité égale, un meuble marqué cote plus qu'une pièce anonyme.
- L'observation de ce phénomène a conduit quelques truqueurs à estampiller certaines pièces, à l'origine vierges de toute marque.
- Aussi convient-il de ne pas attacher trop d'importance à la présence d'une estampille sur un meuble qui ne présente pas un très long pédigree.
- Mieux vaut considérer ses qualités intrinsèques.
Images, la construction des meubles anciens, menuisiers et ébénistes |
Opérations de collage et placage de marqueterie, à gauche l'ouvrier-marqueteur plaque au marteau, à droite un autre se sert du fer à chauffer. |
Ébéniste à son établi procédant à une opération deffleurage. |
La construction des meubles anciens
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